Les mois d’août et de septembre ont marqué l’anniversaire de plusieurs événements centraux de l’histoire estonienne. Le 23 août, l’Estonie, avec la Lettonie et la Lituanie, a célébré les 30 ans de la Voie balte, cette chaîne humaine formée entre Tallinn et Vilnius l’occasion du cinquantenaire du pacte Molotov-Ribbentrop en 1989. Les Baltes ont exigé à cette époque la reconnaissance par le pouvoir central soviétique de l’existence des protocoles secrets au traité de non-agression germano-soviétique qui avaient conduit à l’occupation et à l’annexion des trois États.
Le 31 août, outre la commémoration des 80 ans du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, l’Estonie a célébré les 25 ans du départ des dernières troupes russes du territoire estonien. Ce départ marque, pour les Estoniens, la fin de la Seconde Guerre mondiale, la présence russe en Estonie étant une conséquence du conflit.
Un quart de siècle s’est également écoulé depuis le naufrage de l’Estonia dans la nuit du 27 au 28 septembre 1994 au milieu de la mer Baltique. Seules 134 des 989 personnes présentes, en majorité suédoises et estoniennes, avaient pu être sauvées. Cet anniversaire a été l’occasion de nombreux articles et de reportages de la presse, avec le rappel des faits, des témoignages, mais aussi des points sur les polémiques qui entoure toujours cette catastrophe. Selon la version officielle, le navire a sombré en raison de la perte de son étrave mobile. Mais de nombreuses théories conspirationnistes existent, notamment à propos de l’éventuelle présence à bord de matériel militaire transporté secrètement. Toutes ces théories demeurent vivaces en raison de l’absence de certitude concernant le naufrage : aucune enquête n’a été réalisée sur l’épave. Ainsi, les 25 ans de la catastrophe ont été l’occasion pour certains de s’interroger sur l’opportunité d’effectuer des plongées sous-marines pour lever définitivement les doutes – la Suède a déclaré ne pas voir l’intérêt de nouvelles enquêtes. Enfin, les rescapés et familles de victimes continuent de se battre devant la justice. Si le tribunal de Nanterre a rejeté leur plainte contre le constructeur du navire et la société de certification du ferry en juillet 2019, des procédures sont encore envisagées en Estonie.
Fin août, l’Estonie a retenu son souffle pour savoir qui de Tartu ou de Narva serait désignée Capitale européenne de la Culture 2024. D’un côté, une ville universitaire, associée à un ensemble de communes du sud de l’Estonie, de l’autre, une ville dans sa quasi-intégralité russophone, à la frontière russe, en proie à des difficultés socio-économiques et avant tout sous le feu des projecteurs lors que les relations russo-occidentales se rafraichissent. La candidature de Narva a été fortement soutenue, jusqu’au sommet de l’État après un engagement clair de la part de Kersti Kaljulaid. Il était clair que cette ville avait beaucoup à gagner, cinq ans après avoir été présentée comme une potentielle Crimée dans les médias occidentaux. Mais l’engouement était presque plus vif hors de Narva qu’à Narva même où la municipalité avait un temps réduit le budget alloué au projet. Malgré des différents profils, et si les deux dossiers ont reçu des critiques très favorables, c’est finalement Tartu, qui, après son échec face à Tallinn pour le titre de Capitale européenne de la Culture 2011, a été désignée.
L’été est traditionnellement une période calme sur la scène politique. Août 2019 a un peu dérogé à la règle avec un scandale qui a fait tanguer le gouvernement de Jüri Ratas. En effet, Mart et Martin Helme (EKRE), respectivement ministre de l’intérieur et ministre des finances, ont tenté d’obtenir le départ d’Elmar Vaher, le directeur de la police estonienne. Alors que Mart Helme se trouvait en vacances, c’est son fils, Martin, qui assurait l’intérim au ministère de l’intérieur. Pendant cette période, Martin Helme a tenté de pousser E. Vaher vers la sortie (en le poussant à la démission et en le menaçant de le remplacer – bien que seul le gouvernement en ait néanmoins le pouvoir). Ce dernier a immédiatement fait part de ces manœuvres au public. Les partis de l’opposition, la présidence de la République ont rapidement condamné les actions des ministres d’extrême-droite, rappelant la nécessité de respecter l’ordre constitutionnel. Fin août, les partis de l’opposition parlementaire ont déposé une motion de censure contre le gouvernement de Jüri Ratas, sans succès.
Depuis la formation du gouvernement de Jüri Ratas au printemps, la réforme du système de retraite est un sujet constamment d’actualité. Projet promis pendant la campagne avant les élections de mars dernier, le parti Isamaa a réussi à convaincre ses partenaires du gouvernement d’assouplir le deuxième pilier du système par capitalisation. Selon le système actuel, les cotisations demeurent bloquées jusqu’au départ en retraite. Isamaa souhaite libérer du capital pour les Estoniens en leur permettant de bénéficier, dans une certaine limite, des sommes cotisées avant la retraite et investir, notamment dans l’immobilier. En l’absence de réelles études sur les effets de la mesure, ce choix ne suscite pas l’emballement des milieux économiques. Outre ce changement à venir, le gouvernement a annoncé une hausse exceptionnelle de sept euros de la pension de base au 1er avril 2020, en plus de la hausse de 38 euros par indexation. Actuellement, la pension de base s’établie à 191 euros. (À cette somme s’ajoute la part calculée à partir de l’ancienneté et des cotisations sociales payées.
Dans le secteur du transport aérien, la compagnie estonienne Nordica a annoncé la fin de ses vols réguliers en son nom. Ainsi, l’aéroport de Tallinn n’est plus desservi que par des compagnies aériennes étrangères. Une partie des activités de Nordica va être reprise par LOT (Pologne), dont Nordica utilisait la plate-forme de réservation. De son côté, Nordica va se concentrer sur les activités de sa filiale Regional Jet (copropriété avec LOT), spécialisée dans la mise à disposition d’avions pour d’autres compagnies.
À Tartu, la rentrée universitaire 2019-2020 a marqué le centenaire de l’enseignement universitaire en estonien. Si l’Université de Tartu a été fondée en 1632, les enseignements avaient été jusque-là effectués, selon les périodes, en latin, en allemand et en russe. Afin de célébrer cette date fondatrice, de nombreux événements sont organisés ; les festivités culmineront fin novembre et début décembre à proximité du 1er décembre, jour-anniversaire de la fondation de l’institution en 1632. L’estonien a également été à l’honneur dans le monde entier avec la tenue de la Semaine mondiale de l’estonien (23-29 septembre).
Enfin, la police estonienne a testé une nouvelle méthode pour lutter contre les excès de vitesse sur les routes – les statistiques ne montrent plus d’amélioration en matière de comportement. Au cours de l’expérience menée, les policiers ont laissé un choix aux contrevenants : payer une amende classique ou se « calmer » un peu au bord de la route en faisant une pause de 45 ou 60 minutes (selon la gravité de l’excès de vitesse). L’idée semble avoir été bien reçue par les automobilistes sanctionnés.